Aujourd’hui, je me fête. Trois fois par année, ça se répète. J’ai mis au monde à trois reprises; la dernière fois, il y a 15 ans exactement. Et bien que ce monde soit plus que déconcertant, j’ai une foi inébranlable en ces trois êtres qui ont fait le choix de transformer la personne que j’étais en mère, qui ont choisi de grandir à mes côtés. Je sais qu’ils sauront créer du beau, du bon dans cette réalité. Comme ils l’ont fait pour moi.
J’ai été mère très vite, trop vite. J’ai sauté des étapes; j’ai toujours été rapide et peu patiente. Et il faut croire que l’univers était d’accord avec cette trajectoire. J’avais quelque chose d’important à vivre. Un premier petit être est arrivé sans prévenir et s’est logé en moi, en l’enfant que j’étais encore. Émotionnellement. Loin d’une femme que j’étais. Mon enfance parsemée de traumatismes, de manques, de désirs, d’envies non assouvies prenait encore la place de la vie de jeune femme qui aurait due y évoluer. Il n’y a pas de chemin parfait, de trajectoire idéale. Ça m’a pris du temps pour comprendre à quel point la mienne était tordue et la chance que j’ai eu de me faire accompagner par ces trois petits êtres pour lui redonner un peu de droiture, pour la réaligner, un jour à la fois.
Ma maternité a été le plus beau cadeau que j’ai pu avoir, que j’ai accepté de recevoir. Une partie de moi y a résisté, a combattu. Certainement l’enfant en moi. Je n’ai pas vécu une maternité comme celle qu’on nous montre sous un jour idéal, celle d’une femme qui a attendu si longtemps pour la vivre, qui a eu le temps de la rêver. Je suis tombée dedans. Et la marmite était chaude. J’étouffais par moment, j’avais besoin d’espace, de me trouver, de comprendre ce qui se passait en moi. J’ai crié, j’ai pleuré, perdu patience. Mais j’ai ouvert mon coeur à l’aventure parce que mon esprit, mon cœur, mon âme n’avaient qu’un mot pour moi devant cette opportunité : oui. Un gros oui, le plus certain et le plus épeurant que j’ai eu à entendre.
Aujourd’hui, je fête la mère en moi, mais surtout la femme, le chemin vers cette partie de moi que mes enfants m’ont permis de prendre, de découvrir, de créer. Cette partie de moi dont je veux qu’ils se rappellent. Ils m’ont offert les plus grands défis que j’ai eus (et que j’aurai; c’est pas fini) à relever. Tous les jours, ils me rappellent que nous sommes ici pour être de meilleures personnes. Plus conscientes, plus fortes, plus matures, plus courageuses, plus sensibles et vulnérables. Plus vraies. Chaque jour, je m’efforce de l’intégrer, de me souvenir de mes douleurs ignorées pour les laisser sortir de mon système, pour m’échapper des boucles de patterns qu’elles ont créées. Chaque jour, je m’efforce de me rappeler toutes les joies pour les intégrer elles aussi et en créer d’autres en boucle. Plus de conscience, toujours plus de conscience et de lumière.
Aujourd’hui, je fête la femme que mes amours me permettent de mettre au monde. J’accouche de moi, une contraction à la fois, une ouverture à la fois, grâce à eux, pour eux. Ce sont eux qui font le travail; il suffit d’avoir accouché pour comprendre à quel point on n’est pas en contrôle. Je n’ai donc qu’à m’ouvrir à ce qu’ils ont à m’offrir, à m’enseigner. On est bien naïfs de croire qu’on sait plus que nos enfants, qu’on sait mieux. J’ai mis au monde mes trois plus importants guides et suis leurs enseignements avec grand bonheur depuis plus de 18 ans. J’accouche tous les jours depuis ce temps et commence à être fière de la femme qui se met au monde. J’en ai fait du chemin et sais combien il m’en reste devant. Je n’ai pas peur des défis et embrasse celui-ci avec une foi inébranlable, celle que m’inspirent mes trois magnifiques guides. Ça se fête, ça, non?
Mon fils est né en ce jour du souvenir pour que je me rappelle. Et donc, pour lui, pour eux, pour moi, je me souviens d’où je viens, des eaux naviguées, du chemin, de la houle et du calme plat. Je me souviens de l’importance de fêter chaque espace en soi – l’enfant, la femme, la mère.
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